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Épidémiologie des cryptosporidioses

Le parasite

Parmi les espèces infectant l’Homme Cryptosporidium (C.) hominis et C. parvum sont à l’origine de plus de 90 % des cas de cryptosporidiose humaine mais leurs prévalences respectives diffèrent selon les zones géographiques C. hominis, espèce anthroponotique, infecte quasi exclusivement l’Homme. La prévalence de C. hominis est plus élevée en Amérique du Nord, Amérique du Sud, Australie et Afrique alors que C. parvum domine en Europe. C. parvum infecte un large éventail de vertébrés et notamment les jeunes animaux dans les troupeaux de rente (bovins, ovins, caprins) qui, dans les régions d’élevage, constituent le principal réservoir de parasites. L’Homme, immunocompétent ou immunocompromis, peut s’infecter également par C. meleagridis, C. felis, C. canis, C. muris, C. cuniculus, C. ubiquitum et C. viatorum. Seules les techniques de biologie moléculaire permettent de distinguer avec certitude ces différentes espèces [1].

Dose infectante

Le parasite est très infectieux, avec une dose médiane infectant 50 % des personnes (DI50) qui varie de 9 à 1042 oocystes selon l’isolat de C. parvum et de 10 à 83 oocystes pour C. hominis. Bien qu’on ne dispose d’aucune référence sur la dose infectante chez les patients immunodéprimés, tout laisse à penser qu’elle est bien inférieure à 30 oocystes [2,3].

Prévalence de la cryptosporidiose

Dans les pays occidentaux

La prévalence de la diarrhée a été récemment reconnu comme significative. Dans le monde entier, la cryptosporidiose est surtout une infection pédiatrique et cela est vrai aussi pour l’Europe. La cryptosporidiose est estimée être à l’origine de 0,4 à 1 % des cas de diarrhée aux États-Unis et de 1 à 2 % en Europe, ces taux de prévalence sont plus faibles que ceux dans les pays en développement mais, selon un rapport de 2012 de l’European Centre for Disease Control (ECDC), une augmentation des infections à Cryptosporidium a été observée dans plusieurs pays européens [4]. Les résultats des études de cohorte ont constamment montré que le plus jeune âge était associé à un risque élevé d’infection [1]. Cependant, il est important de noter que les enfants infectés sont susceptibles de transmettre le parasite à leurs parents.

Dans les pays en voie de développement

Suite à une étude récente de grande ampleur réalisée dans les pays en voie de développement et visant à identifier les causes de mortalité par diarrhée chez les enfants,  cette parasitose est apparue comme la deuxième cause de mortalité infantile par diarrhée chez les enfants de moins de 2 ans dans les pays en voie de développement [5].

Mode de contamination

L’infection fait suite à l’ingestion de parasites présents dans l’eau, dans les végétaux ou dans l’environnement (contact avec un individucontaminé). L’accroissement de la séroprévalence avec l’âge est probablement dû à l’exposition croissante, à mesure que l’âge des enfants augmente, à des sources d’infection, notamment au cours d’activités de loisir en plein air. Ce pathogène particulièrement résistant à la désinfection usuelle, notamment à la chloration standard, a été à l’origine d’épidémies d’origine hydrique dans les pays développés et près de la moitié des épidémies d’origine hydrique dues à des protozoaires documentées dans le monde étaient des épidémies de cryptosporidiose [6]. La contamination des eaux de consommation par Cryptosporidium est devenue un problème de santé publique et son contrôle est devenu un défi majeur pour les usines de production d’eau potable.

Facteurs de risque

Des facteurs de risque de cryptosporidiose sont définis et les individus les plus à risque sont les enfants,  les individus fréquentant une piscine ou se baignant dans le cadre d’activités aquatiques récréatives en été : la nage en eau contaminée est en effet reconnue comme un mode important de transmission. Les enfants, à l’occasion de la visite d’une ferme, ayant un contact direct avec des bovins, notamment des veaux, sont à haut risque d’infection par C. parvum. Les voyageurs dans des pays où les conditions sanitaires ne sont pas satisfaisantes sont eux, les plus à risque de s’infecter par C. hominis [7].

Saisonnalité

Dans les pays développés de l’hémisphère Nord y compris la France métropolitaine, la prépondérance des cas est retrouvée chez les patients immunocompétents en fin d’été et en automne. Au Royaume-Uni et en Irlande, un deuxième pic de fréquence, au printemps principalement dû à des infections à C. parvum, a été noté [7].

Sous estimation de la fréquence de la maladie.

Bien qu’elle soit l’une des maladies transmissibles dont la surveillance est obligatoire dans les pays de l’Union Européenne et de l’Espace économique européen, en France, comme dans la plupart des pays, la cryptosporidiose est une pathologie sous-diagnostiquée, donc sous-estimée et considérée comme une maladie rare.

Cela est dû :

  • à l’absence de consultation médicale des patients immunocompétents (soit qu’ils soient asymptomatiques, soit qu’ils soient peu symptomatiques),
  • au fait que la plupart des laboratoires ne recherchent pas systématiquement les cryptosporidies dans les échantillons de selles soumis à un examen parasitologique dit standard, si la prescription médicale ne le stipule pas précisément,
  • à la mauvaise connaissance du rôle de Cryptosporidium en tant qu’agent étiologique de diarrhée,
  • au fait que la cryptosporidiose n’est pas une maladie à déclaration obligatoire et donc finalement non efficacement surveillée par les services de santé publique.

Références

[1] Checkley W, White Jr AC, Jaganath D, et al. A review of the global
burden, novel diagnostics, therapeutics, and vaccine targets for
cryptosporidium. Lancet Infect Dis 2015;15:85–94.
[2] Okhuysen PC, Chappell CL, Crabb JH, et al. Virulence of three distinct
Cryptosporidium parvum isolates for healthy adults. J Infect Dis
1999;180:1275–81.

[3] Chappell CL, Okhuysen PC, Langer-Curry R, et al. Cryptosporidium
hominis: experimental challenge of healthy adults. Am J Trop Med Hyg
2006;75:851–7.
[4] Kuhls TL, Mosier DA, Crawford DL, et al. Seroprevalence of
cryptosporidial antibodies during infancy, childhood, and adolescence.
Clin Infect Dis 1994;18:731–5.

[5]. Kotloff KL, Nataro JP, Blackwelder WC, et al. Burden and aetiology of diarrhoeal disease in infants and young children in developing countries (the Global Enteric Multicenter Study, GEMS): a  prospective, case-control study. Lancet. 2013;382(9888):209-22.
[6] Karanis P, Kourenti C, Smith H. Waterborne transmission of protozoan
parasites: a worldwide review of outbreaks and lessons learnt. J Water
Health 2007;5:1–38.
[7] Chalmers RM, Smith R, Elwin K, et al. Epidemiology of anthroponotic and
zoonotic human cryptosporidiosis in England and Wales, 2004–2006.
Epidemiol Infect 2011;139:700–12.

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